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vendredi 5 octobre 2018

Les jeunes en échec scolaire - Qui sont-ils ? (3/3)

Comment procède-t-on pour que les jeunes en échec scolaire entrent dans les apprentissages ? 


Extrait du livre : 


Aujourd'hui, nous allons évoqué les constats sur le plan cognitif. Retrouvez les articles concernant la partie sociale (ici) et la partie personnelle (ici).

Une non-maîtrise des savoirs de base

      90% des jeunes en échec scolaire que j’ai rencontré ne maîtrisent pas les quatre opérations. Il est frappant de rencontrer un aussi grand nombre de jeunes qui ne maîtrisent pas l’addition de nombres décimaux, la soustraction… A cela, nous pouvons ajouter une compréhension aléatoire des textes, couplée à des constructions de phrases et emplois de mots plus qu’originaux. Cette non-maîtrise est parfois étonnante ! Je travaillais avec une jeune femme d’une vingtaine d’années autour de l’acquisition de la multiplication. Lors d’un atelier où elle m’explicitait point par point comment elle procédait pour résoudre ce type d'opération, elle me dit : « Mais Monsieur, là je n’ai pas le droit de mettre le 3 en retenue ». Ah bon! Je lui en demandai la raison, elle me répondit : « Eh bien, dans les multiplications, les retenues ne vont pas jusqu’à trois. »  Étonnant, non ? Et inimaginable !
Cette non-maitrise des savoirs de base est parfois corrélée avec des troubles spécifiques des apprentissages (TSA). Certains nous disent qu’ils ont eu des séances d’orthophonie pendant quelques années, ce qui leur a permis d’acquérir des techniques pour compenser. Mais une autre partie en grande difficulté dans les apprentissages n’a jamais rencontré de spécialistes (orthophoniste, neuropsychologue…). Souvent, notre intuition nous dit que ce n’est pas qu’une simple difficulté et que, peut-être, il existe des troubles cognitifs plus importants. Des démarches auprès des professionnels qualifiés peuvent alors être entreprises pour évaluer la présence ou non de TSA.
 
Une fuite de l’acte d’apprendre

     Le refus ou l’évitement de l’acte d’apprendre est une caractéristique fortement observable chez ces jeunes. Même lorsqu’ils souhaitent investir la matière, la confrontation avec le temps de réflexion nécessaire à la réalisation d’une tâche peut se révéler insupportable (Boimare, 2004). Pour bloquer l’acte mental, une partie de ces jeunes va réagir par impulsivité, une autre partie par l’inaction. Ils pourront par exemple, remettre en question l’intérêt d’un exercice en prétextant son absence d’utilité pour leurs projets.

En surchauffe… et vive l’action

      Imaginez-vous en face d’un groupe de jeunes : vous tentez d’enseigner une notion. Et là, à peine commencez-vous une explication qu’ils vous disent que ça leur « prend la tête ». Ils vous demandent d’arrêter et ils commencent à s’agiter, à s’endormir. La disponibilité pour les matières est très réduite. Ils vous demanderont rapidement de les mettre en action afin d’évacuer toute cette énergie négative. 
« L’agitation et l’instabilité, avec leurs conséquences  – déficits de l’attention et de la concentration – viennent sûrement en tête de ce « hit-parade » des dérèglements observés par les enseignants. » (Boimare, 2008, p.15)

Un système d’apprentissage non efficient

    Lorsque vous demandez à ces jeunes d’apprendre une leçon, vous êtes frappés par la non-maîtrise de leur système d’apprentissage. Ils tournent les pages les unes après les autres et quand ils arrivent à la fin de la leçon, ils ferment leur livre,  persuadés de l’avoir apprise et surtout de la connaitre. Ils confondent voir et entendre avec apprendre.

La charge émotionnelle des matières scolaires

   Combien de fois ai-je entendu : « C’est pas la peine M’sieur, j'suis nul en maths », « De toute façon j'aime pas l’école ». Les jeunes en échec scolaire ont développé un affectif plus qu’ambigu avec l’école, la rejetant par moments et demandant, lorsqu’ils s’y mettent, un travail purement scolaire comme la dictée.
 

Un rapport étrange à la mémoire

   Ils ne retiennent quasiment rien ou n’arrivent pas à se souvenir des notions scolaires. Et pourtant, ils sont allés à l’école au moins jusqu'à 16 ans. Ils comprennent sur le moment et oublient tout aussi facilement, comme s’ils n’utilisaient pas leur mémoire pour les matières scolaires, alors qu’ils sont capables de mémorisation dans bien d’autres domaines.
 
En résumé, sur le plan cognitif, nous faisons les constats suivants :


  • une non-maîtrise des savoirs de base,
  • une fuite de l’acte d’apprendre et une mise en action demandée,
  • un système d’apprentissage perfectible,
  • une charge affective des matières scolaires,
  • une mémoire capricieuse.

Pour en découvrir davantage sur ce livre, un p'tit tour par (ici). J'espère que ces trois articles vous donneront l'envie d'en savoir davantage sur ce livre.
N'hésitez pas à me poser des questions dans les commentaires !



Cédric MATTESCO

Psychopédagogue, je me suis spécialisé au cours de ma carrière dans l’accompagnement des publics en difficulté d’apprentissages et en échec scolaire. Un parcours atypique : Bac + 5 en sciences (Géologie - Environnement), j'ai débuté dans le monde de l'éducation par un poste d'assistant d'éducation. Je dirige, 15 ans après, un Centre Médico-Psycho-Pédagogique et un Service d’Accompagnement à l’Insertion. 

Depuis mon enfance, je me suis toujours posé certaines questions  : pourquoi certains apprennent, pourquoi d'autres pas ? J'ai encore des souvenirs très précis de situations, comme par exemple en 3e lors, d'une épreuve de brevet blanc, pourquoi ne sommes-nous que deux à avoir eu la moyenne? Pourquoi les copains ont-ils autant de mal à faire leurs devoirs ? Et depuis, ces questions me taraudent toujours...

C'est en 2014, que je commence à partager ma passion pour la pédagogie grâce au blog des remédiations.
 
J'ai également développé un jeu d'apprentissage et de mémorisation de la signalisation routière, Qui roule qui ? : un jeu pour les familles, les écoles et les établissements spécialisés.


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